Mon travail plastique s’inscrit au carrefour de trois notions aux limites mouvantes, poreuses : la mythologie, l’écriture le mouvement comme autant de modulations d’une mémoire travaillée par le temps.
Le traitement d’une matière qui semble fragile et périssable – des résines naturelles en association avec divers matériaux ( pigments, cendres, plâtre…) susceptible de conserver des traces par gravures ou cassures, d’enclore des végétaux, des galets, des papiers, des photos…, de laisser apercevoir par semi-transparence un arriere-plan ou de permettre l’empreinte prise sur mon propre corps ( visages, pieds…) ou de divers objets – imprime à mes réalisations plastiques la nécessité du changement, la métamorphose, le mouvement comme modalité intrinsèque de l’œuvre elle-même.
Mouvement comme métaphore qui met en relation des images entre elles ( mentales, artistiques ), mouvement réel qui anime l’œuvre ( mécanique- électrique ou manuel, vidéo ) ou impression de mouvements au moyen de divers procédés plastiques ( espace perspectif, surface et lignes courbes…), mouvements de la pensée qui s’élaborent à partir de la mémoire des souvenirs et des émotions.
Une mémoire autant individuelle et subjective que collective et qui prélève des traces, des indices, des symptômes à l’affleurement du passé et du présent afin d’en faire lecture – lecture rétrospective autant qu’introspective – et qui remonte à des points d’origine, plus ou moins fictifs mais toujours passionnels car affectifs, et qui sont autant de points de relance au potentiel créatif.
Ainsi j’emprunte des chemins individuels – comme des souvenirs laissés par des passions comme l’Antiquité, la musique, la littérature mais aussi des résidus de l’espace onirique et des sensations d’étrangeté récoltées à la surface de la conscience – et des chemins plus collectifs de la langue ( lettres, mots…) de l’étymologie, du graphisme, des objets de l’écriture, du livre, mais aussi de l’histoire ( récits mythiques, légendes) afin de composer un objet plastique, une représentation qui témoigne du rapport ambigu du réel et de l’imaginaire. Un objet qui se situe au carrefour, dans un entre-deux de la représentation, qui témoigne de cette ambiguité, hésitant entre l’abstrait et le concret, l’animé et l’inanimé, la surface et le volume, qui apparait pourtant vraisemblable et métaphorique, et qui propose au spectateur d’en faire une lecture qui ne soit jamais assertive ou dirigée, figée dans un sens unanime mais au contraire équivoque, ouverte à l’interrogation comme invitation au déchiffrement d’une écriture à traduire selon sa propre sensibilité.